jeudi 13 novembre 2008

Non, les malades mentaux ne sont pas plus dangereux que les autres personnes!... Au contraire!

A Grenoble, un étudiant est mort après avoir été poignardé par un patient échappé d'un hôpital psychiatrique. Vous n'y avez pas échappé. Les médias vont encore se gargariser de ce fait divers tragique... Colportant l'idée reçue, la croyance selon laquelle les malades mentaux sont particulièrement violents et dangereux. Or s'il existe un lien, celui-ci va plutôt à l'inverse de cette prénotion. Les malades mentaux ne sont pas plus dangereux ou violents que les personnes "saines". Au contraire, comme le remarque très justement sur son site Internet l'association canadienne pour la santé mentale, "les gens atteints d'une maladie mentale sont plus susceptibles d'être la victime d'un acte de violence que de le commettre." Et elle ajoute "les recherches en cours démontrent que les personnes atteintes d'une maladie mentale grave sont 2,5 fois plus susceptibles d'être victimes d'un acte de violence que d'autres membres de la société." Un mise au point instructive.

Pour aller plus loin, il faut lire et relire cet article pertinent de Vincent Girard, intitulé "Pour en finir avec la schizophobie", paru dans Le Monde du 17 août 2008. Le psychiatre relatait une récente enquête du centre collaborateur OMS de Lille. "Cette étude réalisée sur plus de 40 000 Français, montre les amalgames forts qui existent dans les représentations sociales des Français entre meurtre, inceste, violence et folie et maladie mentale.", reprend-il. Sans parler de manipulation ou de "seringue hypodermique" médiatique, on ne peut nier le rôle effectif de la presse dans un tel cliché... Si on ne retrouve qu'un seul son de cloche dans la sphère publique, il ne faut pas s'étonner de l'entendre résonner dans les idées des individus. Surtout, si on ne retrouve qu'un unique point de vue dans la sphère publique, c'est que celle-ci fonctionne mal.

La vérité nous est rappelée par Vincent Girard: "environ 95 % des meurtres sont commis par des personnes n’ayant aucune pathologie mentale !"Il reprend également ce rapport publié en mars 2005 sous la direction de l’anthropologue Anne Lovell dans lequel il était écrit: “Le risque attribuable aux personnes malades mentales (…) est faible, les taux estimés sont encore bien moindres si l’on décompte les troubles liés à l’alcool.” Pis, dans le même sens que l'association canadienne pour la santé mentale, l'étude met en évidence le fait qu'à l'inverse du stéréotype, ce sont plutôt les patients psychiatriques qui sont victimes de violences: "La prévalence des crimes violents envers les patients psychiatriques est 11,8 fois plus importante qu’en population générale. La prévalence des vols sur personnes est ,quant à elle, 140 fois plus élevée. 40 % des personnes sans abri présentant une schizophrénie se sont fait agresser au cours des six derniers mois. Le risque pour une femme sans abri atteinte de schizophrénie d’être victime d’agression physique et de viol est tellement important que les chercheurs parlent d’expérience normative."

Bref, les médias, les politiques s'occupent en répandant et/ou en utilisant une idée reçue injuste et stigmatisante. Ils s'en délectent. Maladie mentale + Meurtre = une addition qui fait recette parce qu'elle fait réagir tant dans le public que dans les intervenants médiatiques. Et bien sûr, sur un cas si juteux, Sarkozy ne pouvait s'épargner une gesticulation, en appliquant sa sempiternelle méthode: "un problème ? Je vais vous trouver les responsables et les sanctionner." En effet, un communiqué de la présidence lance: "Cette mission aura pour objectif principal de déterminer les responsabilités de ce drame dans la perspective de sanctions éventuelles". Quant à "la réforme de l'hospitalisation psychiatrique" qui est appelée, elle entend se doubler d'un fichage. De toute façon, on le sait, cette réaction à chaud restera sans suite... Ou fera quelques remous dans le meilleur des cas.

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